Quand le Diabète est là, que manger ?

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Dr Laurence PLUMEY. Médecin Nutritionniste. Fondatrice d’EPM Nutrition

Le diabète est une maladie chronique définie par un taux de sucre (la glycémie) dans le sang trop élevé ; en l’occurrence un taux de glycémie supérieur à 1,26g/l (7 mmoles/l) après un jeûne de 8 heures ; ce taux ayant été vérifié à deux reprises.

Il n’existe pas un mais plusieurs types de diabète.

En effet, le type 1 est dit insulinodépendant (traité par insuline) et il est la forme de diabète la plus courante chez les jeunes diabétiques.  Le type 2 est dit non insulino-dépendant et se voit surtout chez l’adulte, particulièrement quand il est en surpoids voire en situation d’obésité. Il est traité par des médicaments qui augmentent l’efficacité de l’insuline. Quasiment tout est différent entre ces deux diabètes : leurs causes, leurs origines et leurs traitements. Mais ils ont un point commun : un diabète mal traité produit des hyperglycémies chroniques qui abîment la santé des petits et grands vaisseaux artériels et conduisent au bout de 20 ans à la perte de la vue, l’insuffisance rénale et un risque cardio vasculaire élevé.

L’enjeu est donc important mais, actuellement, au vu du fantastique essor des approches thérapeutiques, un diabétique a tous les moyens d’équilibrer son diabète et de vivre aussi longtemps qu’un non diabétique. Il doit donc bien maîtriser ses traitements médicamenteux, son alimentation et son hygiène de vie (sport, sommeil, détente, relaxation).

Bien manger, bien bouger et bien dormir : les assurances vie du diabétique

Si les traitements médicamenteux sont efficaces (à condition de bien les prendre), la qualité de vie et le soin que l’on prend à bien se nourrir, bien bouger et prendre soin de son sommeil sont tout aussi essentiels. Ils contribuent en effet à réguler la glycémie et renforcent l’efficacité thérapeutique des médicaments. Une personne ayant un diabète récent et modéré peut même espérer le voir disparaitre si elle optimise son hygiène de vie.

Une alimentation bien pensée évite d’avoir des pics glycémiques après les repas – une activité physique régulière (voire sportive) permet aux muscles de capter le glucose sanguin dont il se sert comme carburant – un sommeil suffisant permet d’éviter le stress cellulaire.

Les aliments à éviter et à privilégier …

Les conseils nutritionnels donnés au diabétique ont bien changé, heureusement pour lui. Autrefois, on supprimait le sucre et les féculents. Maintenant ce n’est plus le cas. En effet, il ne suffit pas de connaître les quantités de glucides des aliments, il faut également connaitre leur comportement dans notre corps via la notion essentielle de l’Index Glycémique.

L’Index Glycémique (IG) d’un aliment, c’est quoi …

C’est la capacité de cet aliment à augmenter plus ou moins vite la glycémie dans l’heure qui suit le début de sa consommation. Cela dépend de la nature moléculaire des glucides de l’aliment mais aussi de sa composition : plus un aliment est riche en fibres, plus cela abaisse son Index Glycémique. A savoir : au-delà de 70, l’IG d’un aliment est élevé et donc rapide. En dessous de 50, il est bas et donc à privilégier.

Indépendamment du traitement médicamenteux, le but du jeu est donc d’éviter le plus possible d’avoir des glycémies trop élevées et pour cela, il faudra privilégier les aliments dont l’Index Glycémique est bas (moins de 50). Voici donc un détail de ces aliments à privilégier.

Le pain : il n’est pas interdit au diabétique. Il faut simplement bien le choisir car d’un pain à l’autre, l’IG change du tout au tout. Le pain blanc (baguette, pain de mie) a un IG très élevé car supérieur à 80. Alors que les pains tradition, au levain, aux céréales, au sarrasin, et les pains de seigle (en somme les pains à la farine complète et fabriqués de façon artisanale avec des temps de fermentation prolongés) ont des IG beaucoup plus bas, proches de 50. Le pain est à manger lors des repas, en petites quantités – à raison d’une demi-baguette par jour (100g) pour une femme – et un peu plus pour un homme. Il faut éviter le pain blanc à jeun, car il augmente autant la glycémie que des morceaux de sucre !

Les céréales de petit déjeuner : sont à éviter celles qui sont destinées aux enfants car elles sont trop riches en sucre. En revanche, les flocons d’avoine, les céréales complètes et les mueslis riches en fibres élèvent moins la glycémie surtout quand ils sont consommés avec du lait ou du fromage blanc.

Les féculents : éviter ceux qui sont raffinés et privilégier les versions complètes, plus riches en fibres, comme le riz complet, les pâtes complètes et surtout les légumes secs. Les lentilles, les flageolets, les haricots blancs et rouges, les fèves, les pois chiches sont excellents pour les diabétiques car ils rassasient bien et sont faiblement hyperglycémiants.

Le conseil utile …

Quand on mange des féculents, l’idéal est de les associer systématiquement à des légumes crus ou cuits pour que leurs fibres abaissent l’IG des féculents du repas. Par exemple : mélange haricots verts, pommes de terre / ratatouille, riz ou pâtes/ hachis parmentier et salade verte …

Le sucre et les produits sucrés : on ne les interdit plus mais on en contrôle la consommation, bien évidemment. Le diabétique sait qu’il doit éviter le sucre, mais s’il en mange un peu au dessert d’un repas, ce sera moins dommageable pour sa glycémie que s’il le mange à jeun l’après midi en guise de goûter. La confiture, le miel, le sucre, les sirops sont à éviter. En revanche, quelques carrés de chocolat noir sont tout à fait possibles en fin de repas. Quant aux biscuits, certains sont plus sucrés que d’autres : le petit Beurre est peu sucré, alors que les barquettes confiturées sont très sucrées. Il faudrait idéalement ne pas manger plus d’un produit sucré dans la journée ; au demeurant, les enfants qui sont sous insuline doivent avoir une alimentation normale et équilibrée dans laquelle le sucre à sa place (en petites quantités) ; les doses d’insuline seront adaptées en conséquence.

Edulcorants chez le diabétique ?

C’est une possibilité, mais il ne faut pas en abuser car certaines études ont montré que la consommation régulière d’édulcorants semblait perturber le microbiote intestinal et favoriser le développement d’une inflammation, peu propice à l’équilibre d’un diabète. Il faut surtout se déshabituer du goût sucré à outrance.

Les fruits : ils contiennent tous des sucres naturels mais leur richesse en fibres fait qu’en moyenne leur IG est plutôt bas. A raison de 3 à 4 fruits frais par jour, au dessert des repas, ils occupent une place essentielle dans l’équilibre alimentaire. Attention aux fruits très sucrés comme la banane bien mûre. Attention aussi aux smoothies qui concentrent plusieurs fruits en un seul verre et qui, au final, apportent beaucoup de sucres naturels. Attention aussi aux compotes sucrées du commerce. Les choisir sans sucres ajoutés. Et bien évidemment éviter les fruits au sirop et les fruits secs de type raisins secs et dattes. En revanche, les fruits oléagineux de type amandes, noix et noisettes sont excellents pour le diabétique.

Jus de fruits ou pas ?

On dit toujours qu’il faut préférer manger un fruit plutôt que de le boire. Certes … si on a le temps. Mais le matin quand on est pressé, le verre de jus d’orange est bien utile, qu’il soit pressé ou en bouteille car il apporte 65% du besoin quotidien en vitamine C. En bouteille, il ne contient pas de sucre ajouté et son IG est à peine plus élevé que celui du fruit. Donc, oui au verre de jus d’orange par jour – et aux 2 à 3 fruits frais à manger, par ailleurs.

Les boissons : il faut éviter bien évidemment les sodas et autres boissons sucrées (y compris au thé glacé). Le soda édulcoré ne doit pas remplacer l’eau table au motif qu’il ne contient pas de sucre. Il doit rester une boisson occasionnelle. Quant aux eaux, se méfier des eaux dites aromatisées car certaines d’entre elles peuvent contenir jusqu’à 10 morceaux de sucre par litre. Il faut donc bien lire les étiquettes et éviter une eau arômatisée qui mentionne ce qui vous paraitre peu : « seulement » 5g de sucres/100ml ; cela fait en réalité 50g de sucre par litre soit 10 morceaux de sucre de 5g chacun !

Le thé et le café sont excellents pour un diabétique car ils sont riches en anti oxydants mais à condition de ne pas y ajouter de sucre, miel, sirop d’agave. L’eau plate ou gazeuse est bien évidemment à boire à volonté et reste la boisson de référence.

Une journée de menus bien pensés …

Le maître mot chez le diabétique est le mot régularité. Pas question de sauter des repas. Le mieux est de prendre 3 repas par jour et une collation l’après-midi – et de manger varié, équilibré avec des repas et aliments à IG bas, le tout contrôlé en gras et en sucre. Concrètement, celà peut donner ceci :

Au petit déjeuner : un laitage nature (lait, yaourt, fromage blanc), un fruit frais ou une compote sans sucre ajouté ou un verre de jus d’orange, du pain tradition ou des céréales complètes ou des flocons d’avoine, thé ou café (sans sucre). Eviter la confiture, le miel.

 Au déjeuner : un plat avec viande, poisson ou œufs et mi légumes mi féculents, laitage ou fromage, un peu de pain tradition, un fruit.

L’après-midi : un fruit, un laitage nature et éventuellement quelques amandes.

Le soir au dîner : une assiette de légumes et d’un peu de féculents avec éventuellement un peu de poisson, viande ou oeufs pour ceux qui veulent, un laitage nature et un fruit. Le chocolat noir du soir est autorisé !

Question activité physique et sport : bouger, bouger, bouger

Bouger est un médicament pour le diabétique car les muscles en mouvement captent le glucose et contribuent donc à faire baisser les glycémies. Il faut donc marcher tous les jours au moins 45 mn, privilégier les escaliers aux ascenseurs et faire du sport 2 à 3 fois par semaine.  Il faut toujours se munir d’un peu de sucre ou de biscuits sucrés pour réagir en cas d’hypoglycémie pendant l’effort et bien sûr avoir sur soi sa carte de diabétique, toujours utile en cas de malaise.

Questions stress, sommeil et relaxation : dormir !

Le stress et le manque de sommeil augmentent la sécrétion d’hormones du stress (adrénaline, cortisol) qui font monter la glycémie. Il faut donc éviter ces situations et veiller à un sommeil de qualité et suffisant (au moins 7 à 8 heures par nuit) en se couchant idéalement avant minuit. Idéalement, il est bon de pratiquer des activités de relaxation de type yoga, pilates … et de marcher en pleine nature !

Enfin, question santé : penser au contrôle annuel complet.

Le diabétique doit surveiller ses glycémies régulièrement (avant et après chaque repas quand il est sous insuline) et lors de bilan trimestriels (glycémie à jeun – et taux d’hémoglobine glyquée qui doit être inférieur à 7% chez un adulte). De plus chaque année, il faut faire un bilan complet comprenant les yeux, les reins, le cœur et les vaisseaux, les nerfs, les pieds, les dents. Ce check up médical permet au diabétique de mesurer l’impact de son diabète sur sa santé et de s’en féliciter ou au contraire de viser à faire mieux. De plus, maigrir est nécessaire en cas de surpoids ; le simple fait de perdre du poids suffit à diminuer les glycémies et conduit à baisser les doses de médicaments. Par ailleurs, la chirurgie bariatrique réservée aux obèses a montré toute son efficacité quant à la disparition d’un diabète débutant dans les 1 à 3 mois qui suivent l’opération.

Quant à l’avenir des traitements, tout espoir est permis. La pompe à insuline devient toujours plus performante, les lecteurs de glycémie au bras permettent des contrôles réguliers et non douloureux, les traitements médicaments se multiplient et s’affinent dans leurs objectifs ; le pancréas artificiel sera peut-être la réalité de demain. La science progresse donc vite et à chacun de bien se prendre en charge pour se donner les moyens de vivre longtemps et en bonne santé !