Comment arrêter le tabac sans prendre de poids ….

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Plus de la moitié des fumeurs déclare avoir envie d’arrêter de fumer, mais certains hésitent encore à le faire par peur de prendre quelques kilos.  Pourtant, la prise de poids n’est pas systématique. En effet, on estime qu’environ 1/3 des fumeurs ne prendront pas de poids à l’arrêt du tabac, voire même en perdront.

Pour les autres, la prise de poids sera en moyenne de 2 à 4 kilos, ce qui correspond surtout à un rattrapage pondéral. En effet, la nicotine augmente le métabolisme de base de 200 à 300 kcal/jour et donc la dépense énergétique. Elle exerce également un léger effet coupe-faim. Raison pour laquelle, au début du tabagisme, on perd en général un peu de poids – puis on se stabilise. Raison également pour laquelle quand on arrête, on récupère ces 2 à 4 kilos perdus. Ce n’est donc pas à proprement parler une prise de poids mais plutôt un juste retour pondéral.

Enfin, chez certaines personnes, la prise de poids peut être plus importante (au-delà de 5 kilos). Même si cela ne concerne que 10% des fumeurs, personne n’a envie d’être concerné et cela se comprend. Les plus à risque sont les grands fumeurs et fumeuses et ceux et celles chez qui existent déjà des tendances aux grignotages et compulsions. Celles-ci risquent de se trouver renforcées suite à la frustration souvent ressentie (du moins au début) lors du sevrage tabagique.

Il faudra donc veiller à une alimentation saine, variée et équilibrée – à titre préventif – ce qui n’est pas toujours facile surtout lorsque que l’on s’est habitué à manger souvent gras, salé et sucré. On constate en effet fréquemment ce type de comportement chez les fumeurs et fumeuses car la fumée de cigarette anesthésie les papilles gustatives et pousse à manger des plats gras et salés aux goûts plus prononcés que des plats de légumes.

En somme, idéalement, il faut prendre ou reprendre de bonnes habitudes en augmentant la consommation de légumes, en faisant des repas complets et équilibrés et en limitant les grignotages entre les repas. Pas toujours facile quand la fringale est là, que la cigarette manque tant à la fin du repas et que l’envie de bonbons ou de chocolat se fait alors pressante. Il existe pourtant des astuces ….

Pour éviter les fringales ….

Le premier mois suivant l’arrêt du tabac, il n’est pas rare de noter une augmentation de l’appétit et de fringales, mais c’est un phénomène transitoire. Voici quelques conseils permettant de les limiter :

  • Ne pas sauter de repas. En effet, manger régulièrement évite les grosses fringales non contrôlées …
  • Faire des repas suffisamment consistants avec plat principal et deux desserts (viande, poisson ou œufs avec légumes et féculents, fromage ou laitage et fruit) pour se sentir longtemps rassasié(e).
  • Manger des féculents à chaque repas, en accompagnement des légumes. En effet, pas question de supprimer pain, pâtes, riz et légumes secs, au motif qu’ils risqueraient de faire grossir ! Ils permettent surtout de rassasier durablement et sont un excellent rempart contre les grignotages de l’après-midi ….
  • Augmenter sa consommation de fibres, afin d’augmenter encore davantage la sensation de rassasiement et recevoir également beaucoup de vitamines et anti-oxydants contribuant au « nettoyage » du corps de tous les polluants véhiculés par la cigarette … Pour cela, mangez au moins 5 fruits et légumes par jour, préférer au pain blanc le pain complet, aux céréales, au son, de seigle…, privilégier les pâtes complètes, riz complet, riz sauvage… à alterner avec les légumes secs (haricots rouges, pois chiches, flageolets, lentilles…).
  • Éviter les boissons et aliments sucrés pendant et hors des repas, car non seulement ils apportent des calories inutiles mais de plus, en faisant augmenter rapidement la glycémie, ils déclenchent la sensation de faim 1 à 2 heures après les avoir consommés.

La fin du repas et l’après-midi, les moments de tous les dangers …

Très souvent la cigarette fumée en fin de repas signe la détente et la fin du repas. Maintenant qu’elle n’est plus là, l’envie se fait pressante soit de craquer soit de remplacer la cigarette par un substitut sucré qui apaise les tensions et frustrations, de type chocolat ou biscuits. Pour limiter ce risque, il est préférable de trouver un substitut qui ne fasse pas grossir, comme des chewing-gum sans sucres, ou des gommes à mâcher de type substitut nicotinique. Si on est chez soi, on peut aussi marquer la fin du repas en se lavant les dents. Un signal très efficace ! Sinon, on peut aussi faire une promenade digestive et ainsi occuper ses pensées à autre chose qu’à manger …

Surtout ne pas se lancer dans un régime mais manger équilibré et varié …

La tentation pourrait être grande de se lancer dans le contrôle calorique en se fixant ainsi de multiples objectifs tels que « j’arrête de fumer – je garde la ligne et je refais du sport ». Attention, à ne pas trop en faire en une fois au risque de déstabiliser l’objectif premier et principal qui est l’arrêt du tabac, et qu’il faut réussir. Il est donc préférable de se recentrer sur l’effort que demande le sevrage tabagique et de trouver du plaisir (et non pas de la frustration) dans sa vie quotidienne. En somme, manger gourmand, varié, équilibré et suffisamment – tout en étant actif (ve).

Donc, au programme : Un bon petit-déjeuner matinal avec lait ou laitage (yaourt, fromage blanc ou fromage), pain ou céréales de type muesli, fruit frais ou en jus, et une délicieuse boisson chaude de type café, thé ou chocolat chaud …

Un déjeuner suffisant et gourmand avec crudités, plat de viande, poisson ou œufs avec mi-légumes et mi- féculents, un peu de pain, un bon fromage ou un laitage et un fruit de saison. Un petit café ou thé signera la fin des festivités.

L’après-midi, on se fera plaisir avec de nouveau un ou deux fruits de saison et éventuellement des amandes.

Le dîner sera léger (le secret du contrôle du poids) avec un repas riche en légumes et pauvre en féculents et sauces. On privilégiera en dessert un laitage et un fruit et on évitera les desserts sucrés et l’alcool.

Prendre soin de soi et être à l’écoute de son corps

Le corps nous parle et il faut être à son écoute.  Il y a probablement un peu d’essoufflement à l’effort et de toux matinale au début d’un sevrage tabagique. Raison de plus pour augmenter la fréquence des promenades et randonnées en forêt – ou à défaut, une marche d’au moins 30 mn chaque jour, dans son quartier. Le sommeil est également un important facteur d’équilibre personnel. C’est le moment de se coucher plus tôt (bien avant minuit) et d’en faire un vrai petit cérémonial annonciateur d’un bon moment de récupération : pas d’ordinateur ni de téléphone, pas de musique agressive … mais plutôt une bonne douche tiède (trop chaude, elle rend l’endormissement difficile) et une chambre calme, fraîche et dans l’obscurité. L’idéal : dormir entre 7 à 8 heures, par nuit. Enfin, découvrir les joies du yoga qui réconcilient le corps et l’esprit.

En somme, c’est une petite révolution qui se prépare. Avec le sevrage tabagique, arrive l’envie de prendre soin de soi et de sa santé. Cela ne se fera pas en un jour, mais quand l’envie est là, tout vient à qui sait attendre … et mettre en pratique !

Dr Laurence PLUMEY. Médecin Nutritionniste. EPM Nutrition